Nouvelle Donne n’a pas rejoint la meute criant au Watergate, demandant démission sur démission. Certains chefs de meute oubliant par la même occasion qu’ils furent acteurs ou avocats zélés de faits d’une autre nature mais d’une gravité égale.
Bien sûr que le fait est grave et que les mensonges ou les écrans de fumée sensés couvrir la faute initiale sont pitoyables. C’est le théâtre politique avec lequel Nouvelle Donne souhaite rompre. A quoi bon y faire de la figuration.
Premier épisode :
Alexandre, le bienheureux. (Tourné le 1er Mai mais diffusé le 18 juillet)
Donc Benalla a tabassé gaillardement. Comme cela dit en passant un certain nombre de policiers (eux-aussi filmés) depuis l’inauguration en grande pompe de l’extension de l’état d’urgence à la manifestation de la COP 21 en octobre 2015. Comme aussi ce jour-là quelques manifestants.
Dans les trois cas, c’est pas bien. D’ailleurs quand un manifestant violent est pris il prend cher. Les policiers doivent faire régner l’ordre, c’est une violence « légitime » encadrée. Benalla, lui devait protéger le Président. Mais hélas pour Benalla le Président n’était pas là. Du coup il perdait son pouvoir magique et il devait passer par la case prison (ce qui lui permettait de rendre son bel appartement qui lui coûte un gros bras).
Deuxième épisode
Les hommes du président
Bruno Roger-Petit affirme que dès que Benalla a été identifié il a été mis à pied 15 jours. Non mais. On ne rigole pas dans notre république exemplaire. Bon, la mise à pied de Benalla c’était du pipeau. Il a été vu « en service ». Photographié, filmé, enregistré. La totale.
Collomb a menti. Le 23 juillet, il affirme ne pas connaître Benalla malgré toutes les preuves déjà recueillies. Il en profite pour charger habilement l’Elysée. Dans le nouveau monde, il fait parler le métier appris dans l’ancien. Incompétent peut-être, menteur sûrement, mais pas coupable
Castaner (un gars hilarant non utilisé dans les manifs) a menti. Lui non plus ne pouvait pas douter que le bus des bleus avec Benalla allait être photographié ou filmé. Il a depuis persévérer. Comique de répétition.
Donc des hommes politiques ont menti. Mal.
Qui pouvait sérieusement penser que ces mensonges passeraient. Qu’aucune image, qu’aucun document écrit ou sonore ne viendrait les pulvériser leur défense.
Ce qui est hallucinant c’est que cette défense de garnement pris la main dans le pot de confiture a été mis en musique par le premier cercle de la Start Up Nation.
On tremble quand on pense aux décisions importantes prises sur des conseils de tels pieds nickelés.
Troisième épisode
Bruce tout puissant
Le 24 juillet, Emmanuel Macron parle.
A première vue ça ne manque pas de panache ce « Le responsable c’est moi ». Jupitérien un jour Jupitérien toujours.
Mais il ne craint pas les foudres de la justice. Bien à l’abri derrière l’article 68 de la Constitution. Chirac et Sarkozy s’y étaient avant lui abrités efficacement le temps de leur mandat.
Mais que dit-il derrière : « Qu’ils viennent me chercher ». Joli bras d’honneur aux parlementaires de la commission d’enquête, aux journalistes qui ont fait leur boulot (mieux vaut tard que jamais) et aux mécontents.
« Le préfet je l’emmerde » avait tonné Benalla le 16 juillet lors de la descente des Champs-Elysées par les bleus.
Le style diffère mais le sentiment d’impunité est le même. Pas besoin de fusible.
Si ça se trouve, ils s’en foutent, les conseillers du président et le Président lui-même.
Indestructibles. Ils ont gardé le style commando de la campagne présidentielle.
Que retenir des épisodes précédents :
Tout d’abord quand on choisit Bruno Roger-Petit comme porte-parole, c’est qu’on ne compte pas vraiment sur lui. La comm, la vraie c’est le Président qui s’en charge.
On se souvient du « responsable mais pas coupable » dans l’affaire du sang contaminé. On se souviendra du « qu’ils viennent me chercher.
La responsabilité confère à l’homme de la grandeur
Mais à tout choisir Emmanuel Macron préfère être responsable de la place de la Contrescarpe que de la frustration des supporters des bleus voyant filer le bus des champions du monde.
Le pouvoir est à l’Elysée. Tout le pouvoir. Aux mains d’un cercle restreint de fidèles. Macron perfectionne la machine infernale que Hollande avait lancée sur les rails de l’efficacité.
Les politiques élus sont réduits à de la figuration. Et à jouer avec les motions de censure.
On peut pour une fois laisser le mot de la fin au premier secrétaire du PS, Olivier Faure parlant « d’un clan qui s’autorise tout parce qu’il ne se croit redevable de rien et un président qui a placé la loyauté à sa personne au-dessus de la légalité »
Quelles conséquences ?
Dans l’immédiat, va falloir mettre en stand by les réformes qui fâchent : la réforme constitutionnelle d’abord, la sécurité de la présidence ensuite, d’autres encore. Mais vous ne perdez rien pour attendre.
Collomb une des rares politiciens de son équipe rompus aux joutes de l’ancien monde n’a pas joué très collectif. Il prépare sa sortie.
L’opposition s’est requinquée. Trop contente d’avoir un os à ronger, elle va s’y accrocher. La rentrée va être leur baroud. Mais Les divisions sont telles à droite comme à gauche (et c’est visible dans la préparation des élections européennes) que Macron n’a peut-être pas tort quand il parle « de tempête dans un verre d’eau »
Macron qui recherche chez ses conseillers la fidélité plutôt que les compétences, s’est isolé encore un peu plus du personnel politique. Mais les premiers de cordées apprécient. Et les citoyens pensent à leur quotidien.
En ultralibéral qu’il est, il en applique les règles: gouverner avec un nombre restreint de fidèles, mépriser les adversaires, répéter qu’il n’y a pas d’alternative et avancer au pas de charge.
Si les résultats économiques soutenus par la croissance mondiale sont au rendez-vous, ce qui ne semble pas être le cas aujourd’hui, et compte-tenu du fait que l’offre politique alternative émane de partis comme Nouvelle Donne sans visibilité, pour le coup on risque de ne pas avoir d’alternative. En tout cas pour les européennes de 2019. Ça ne manque pas d’inquiéter.